Dieu le Père
De l'obsession
Conférence prononcée le 15 février 2018 dans le cadre des conférences de l'Association libanaise pour le développement de la psychanalyse.
Présentation de la conférence
Ingrid Sawaya Geday
Le Livre 22 de la Genèse relate le sacrifice d'Isaac : Dieu demande à Abraham de sacrifier son fils Isaac (littéralement sa « joie ») en son nom.
Au moment de s'exécuter, l'Ange de l'Éternel (Dieu n'est jamais désigné de son nom, ce qui n'est pas anecdotique pour notre propos de ce soir) apparaît donc à Abraham et lui présente un bélier à sacrifier en place et lieu du fils chéri, tant attendu par Abraham et Sarah.
Que la parole de Dieu soit médiatisée, transcendée par la présence d'un tiers (ange) ; que cet épisode terrible de la relation de l'homme à son Créateur se déroule en l'absence de la mère du dit fils (Sarah est décédée avant cet épisode), est aussi important pour ce qui va suivre.
Dans la peinture du Caravage de cette scène, l'ambiguïté du message divin est manifeste si l'on regarde la main de l'ange : retient-elle ou pousse-t-elle celle d'Abraham à l'infanticide ?
En effet ce texte a été amplement repris pour tenter d'y décerner la dimension symbolique de la demande de Dieu.
Qu'Abraham ait choisi de l'entendre dans la réalité amène à poser la question de son désir infanticide, et du rapport narcissique dans le rapport à l'Autre. Abraham ne fait-il pas dire en quelque sorte à Dieu son propre désir meurtrier ?
L'Autre est moi et je suis l'Autre, et par là même ma parole est la parole de l'Autre. Il y a donc dans ce rapport quelque chose d'évanoui.
Ce soir Wafica Kallassi va nous présenter un cas de névrose obsessionnelle revêtant une forme religieuse et où les protagonistes ne sont pas sans rappeler ces héros bibliques.
L'obsession est décrite par Lacan comme un phénomène à deux temps où le premier temps est l'angoisse.
Le registre de l'angoisse est cette évanescence, cette perte, « transformation du moi », qui selon Lacan qui amène ce vertige.
Il faut l'introduction du tiers dans ce rapport narcissique pour permettre un accomplissement symbolique de ce désir présumé d'Abraham.
Ceci dans le registre de la loi (parole) ou de la culpabilité (symptôme).
Pour Octave Mannoni, l'angoisse peut conduire à la honte, ou au doute, et c'est la situation analytique qui permet l'accès à la culpabilité.
Là où le père n'aura été qu'un surmoi, la présence de l'analyste juge, détient la parole.
Le registre de la loi prend alors le pas sur celui de l'agressivité.
Pour Lacan, « le moi est ce dans quoi le sujet ne peut se reconnaître d'abord qu'en s'aliénant. Il ne peut donc se retrouver qu'en abolissant l'alter ego du moi ». Là se développe la dimension, très distincte, de l'agression, qui s'appelle d'ores et déjà l'agressivité...
Kafka illustre brillamment les conséquences psychiques de la menace et de l'agressivité paternelle. Le héros Kafkaïen de la métamorphose, où un jeune homme, Gregor, se transforme en insecte sous le joug de la tyrannie paternelle, démontre cette problématique narcissique, homosexuelle (homo : même, semblable).
En effet Dans le récit kafkaïen le narcissisme du père est tributaire de la dégradation psychique du fils. Kafka décrit une scène où le père passe progressivement d'enfoncé, engoncé, avachi en robe de chambre dans un fauteuil à une posture toute droite en uniforme strict, au fur et à mesure de la dégradation morale de son fils.
Dans cette problématique narcissique l'altérité prédomine : pour que l'un vive, il faut que l'autre meure.
Il FAUT que l'autre meurt, pour que l'un vive.
Ces deux récits (Isaac et Gregor) se déroulent sans mère triangulante, dont la fonction serait d'interdire l'inceste père-fils sous forme de meurtre homosexuel du même. On trouve là un signe de la dimension bien encombrante de l'altérité.
Dans le récit de Kafka la mère apparait dans un fantasme de parents combinés où la scène primitive n'a de conséquence que d'arrêter la violence infanticide du père, comme le bras de l'ange. Elle intervient en se jetant sur le père, l'enlaçant jusque ne faire qu'un avec lui, le conjurant d'épargner la vie de son fils.
Parlons un peu d'Isaac maintenant : cette scène est tantôt désignée par « Le sacrifice d'Abraham », tantôt par « Le sacrifice d'Isaac ».
Isaac, selon les calculs, a la trentaine bien sonnée au moment des faits ; ce n'est pas un enfant, ce qui confère à cette position passive, abandonnée, qui s'offre à Abraham en position dominante et phallique une dimension masochiste.
Cette posture d'offrande absolue n'est d'ailleurs pas sans rappeler l'extase mystique de Sainte Thérèse.
Wafica Kallassi est co-fondatrice de l'ALDeP dont elle est l'actuelle Secrétaire Générale et membre superviseur. Elle est aussi psychanalyste d'enfants et membre direct de l'IPA.
Je vous laisse avec son exposé théorique et clinique de la fonction de l'analyste dans ces transformations de ce jeune homme en proie à la tyrannie d'une voix despotique.
Conférence de Wafica Kallassi
« … À l’occasion des 35 ans de son fils, Jakob Freud lui offrit une Bible accompagnée d’une dédicace, dont l’écriture pleine de tendresse n’en constitue pas moins la transmission d’un commandement se perdant dans le fond des âges : “… Va, lis dans mon Livre… et s’ouvriront à toi les sources de l’intelligence, du savoir et de la sagesse. Ceci est le Livre des livres où les sages ont puisé ; où les législateurs ont appris le savoir et le droit… Depuis lors, le Livre est resté en réserve, comme les débris de tables… Pour le jour où tes années ont atteint cinq et trente ; et je te l’ai dédié afin qu’il soit pour toi un mémorial ; un rappel de l’amour de ton père qui t’aime d’un amour éternel. » (d’après Y. H. Yerushalmi, Le Moïse de Freud, Paris, Gallimard, 1993, p. 195, cité par J.-C. Stoloff, La fonction paternelle, In press, paris, 2007, p. 192)
Cette lettre du père de Freud, cette voix, ce commandement marqueront son œuvre qui, au fil des années, oscilla entre rationalité et spiritualité, entre athéisme et racines bibliques, au point de dire que la psychanalyse est une science juive inspirée du Talmud ! Les débuts de Freud, sur lesquels il édifia la psychanalyse, voulue scientifique, furent influencés par la mythologie grecque (Athènes) et le mythe d’Œdipe qui tue son père. Freud commence par détruire son attachement au père et finit ses jours en apprivoisant la révélation, s’approchant ainsi de Jérusalem, commandement paternel et divin. Cette dernière approche déteindra sur la série de ses quatre livres : Totem et Tabou, Avenir d’une Illusion, Malaise dans la civilisation et enfin, paru post-mortem, Moïse et le Monothéisme. Dans ce dernier livre, il boucle le cycle de sa vie et de sa pensée avec le meurtre du père Moïse par un parricide juif, comme il commença sa carrière avec le meurtre du père d’Œdipe ; dans ce dernier ouvrage il attaque le judaïsme en arrachant Moïse aux juifs en lui conférant une origine égyptienne ! A noter que la littérature psychanalytique hésita quelque temps entre complexe d’Œdipe et complexe paternel. Freud s’exprime dans ces lettres avec le terme « Vaterkomplex » (complexe paternel).
Dieu le père est à l’origine du commencement des temps comme il l’est aussi pour la psychanalyse, ainsi que pour toute société et tout individu ; l’amour et la haine envers ce père et ses commandements. Il semble que le père de Freud s’adresse à son fils avec cette lettre-commandement comme on le ferait à un prophète ! Ceci marquera son œuvre avec une grande teneur de judaïsme. Freud joue le rôle de ce prophète qui parle plutôt pulsions que spiritualité, cassant avec la tradition juive tout en la continuant vers la fin de sa vie. Devenir le père de la psychanalyse en sapant ses origines avec Moïse l’égyptien… comme pour en finir avec ses origines juives et sa descendance paternelle. On dirait que Freud a lutté toute sa vie pour combattre l’amour porté à son père, comme celui voué à son ami Fliess ; de même il tente de contrecarrer son homosexualité et la féminité inhérente à elle. Il oscille ainsi entre l’amour et la haine du Père, tergiverse entre la rationalité à la spiritualité et invente la psychanalyse qui selon M. Robert repose sur elle-même, ayant ses propres lois, mesures et vérités.
Freud était devenu Dieu le père d’une nouvelle « religion pulsionnelle », bien qu’imbibé de spiritualité. Marthe Robert écrit dans son livre D’Œdipe à Moïse (p. 239-240) : « … Freud lui-même croyait depuis toujours aux prémonitions, aux nombres significatifs, aux coïncidences mystérieuses et à la transmission de la pensée. » Elle déclare un peu plus loin : « […] il se soit toujours gardé d’élever l’irrationnel à la même dignité que la raison. […] La meilleure preuve en est fournie précisément par ses vagabondages du côté de la télépathie, car ce qu’il a publié en fin de compte sur le sujet (Traum und telepathie, G. W., XIII, p. 165-191) ne se distingue en rien de ses travaux plus classiques. « L’humanité, dit-il un jour à Binswanger, a toujours su qu’elle avait de l’esprit ; mais j’ai dû lui montrer qu’elle avait aussi des instincts. Mais les hommes sont toujours insatisfaits, ils ne peuvent pas attendre, il leur faut toujours quelque chose de complet et d’achevé. » La psychanalyse par rapport à M. Robert n’est que la science de l’occulte car l’inconscient pourrait être identifié comme objet occulte et non scientifiquement prouvé.
Cet amalgame de Dieu et du Père semble omniprésent depuis le début des temps, de la horde primitive jusqu’à notre civilisation actuelle qui n’est qu’un reflet des premières lois culturelles : la prohibition de l’inceste et l’interdit du meurtre du père. Ainsi, La mort du père primitif tyrannique marque la naissance de Dieu, par l’édifice d’un totem à sa mémoire : « Dieu est un père exalté, la nostalgie du père est la racine du besoin religieux. » affirme Freud dans Totem et Tabou. La loi sociale, universelle, stipulée après le meurtre du père éloigne le risque de la potentialité narcissique dirait J. C. Stoloff (La fonction paternelle, In press, 2007), de sorte que dieu était devenu dieu-fonction , fonction paternelle.
Freud affirme dans Inhibition, symptôme et angoisse que l’expérience du danger et de la peur précède l’angoisse devant le surmoi et la culpabilité inconsciente. Freud parle probablement de la peur et de l’impuissance originelles de l’être humain face aux forces de la nature qu’il a établies alors comme des dieux à craindre. Viendra par la suite le meurtre et le repas totémique ainsi que ses conséquences : la culpabilité et la peur des représailles d’une âme revenante de ce père. Cette pensée magique et animiste transmise probablement de la phylogénèse à l’ontogenèse, marquera toujours, jusqu'à nos jours, notre pensée et nos actes au sein d’un siècle scientifique par excellence. A noter que la religion animiste est un culte aux morts plutôt qu’aux divinités, selon Durkheim. Ce qu’on verra nettement avec notre cas clinique où la religiosité relève plus d’un culte à son père décédé qu’aux providences divines. Même certains auteurs soutiennent l’hypothèse que l’enfant possède une faculté en quelque sorte innée de divinisation, comme un « instinct religieux ». Des scientifiques vont jusqu’à parler d’un gène responsable d’une aspiration à un Dieu ou un créateur.
De son côté, Freud affirme dans Avenir d’une illusion que la religion est la névrose obsessionnelle de l’humanité vu la similitude entre le rituel religieux et celui de l’obsessionnel. En même temps, la névrose obsessionnelle individuelle pourra prendre des envergures religieuses pathologiques où la rigidité du surmoi se revêt de commandement religieux, de cette image d’un dieu despote, à l’image de celui de l’ancien testament, reflétant les interdits parentaux. « Dieu obscur », comme l’appelle Lacan, dont la violence est d’accomplir sa volonté en effaçant le désir du sujet et et l’acculant au sacrifice ; sacrifice d’une vie, comme c’est le cas pour notre patient qui s’exprime fortement à propos de ce surmoi insurmontable :
« Je crains profondément la loi, le Pouvoir, l’Autorité et je redoute de m’en écarter ! J’ai peur de désobéir, de me révolter, de m’insurger, de m’opposer, de vivre à ma guise, appréhendant un malheur quelconque qui pourrait survenir… »
Le surmoi archaïque prendra alors la forme d’un Dieu fondamentaliste qui demande la totale dévotion !
Dans cet exposé, j’aimerai donner un exemple vivant, incarnant la torture de l’humanité à travers une obsession masculine qui se muta en obsession religieuse où Dieu le Père ne fut qu’une projection du père despote .
A. Vergote et A. Tamayo affirment dans The parental figures and the representation of god (Leuven University Press, 1980) qu’en réalité les figures du père et de la mère ne sont pas séparés, théorie certifiée par M. Klein et les parents combinés, bien que dans le christianisme, Dieu est plutôt une figure du père que de la mère (l’église symbolisera dans ce cas le côté maternel contenant - en principe !). Vergote parle clairement d’une interaction claire entre la représentation de Dieu et la psychologie paternelle. Mircea Eliade (Patterns in comparative Religion, London, Sheed and Ward, 1958) couronne les divinités de caractère surmoïque en déclarant : « … ce qu’on appelle histoire des divinités célestes est largement une histoire de notions de force, de lois et de souveraineté. »
A ce sujet, Fouad crie désespéré : « Je sens toujours que Dieu est lunatique, quand je commets une erreur il me maudit, se met en colère, me chasse, n’est pas satisfait. Je me sens rejeté, haï… je ne me sens pas aimé, accepté comme je suis, comme si Dieu s’est désisté de moi et me déteste ! »
Cet image d’un Dieu souverain absolu comme celui de l’ancien testament, n’est que la projection du père même de Fouad qui était despote et qui le violentait tout le temps. Ce père introjecté deviendra ce surmoi sadique, tyrannique, abusant de son autorité ; cette « voix » persécutrice qui le commande nuit et jour. Fouad l’exprime fortement : « J’ai peur d’insulter, d’injurier ou proférer un langage vulgaire. Je le sens toujours là à l’aguet, attendant la moindre erreur de ma part pour me détruire, m’écraser, me tuer même. Comme s’il lui était permis de faire de moi ce que bon lui semble sans que je puisse riposter, me défendre. » Ce Dieu-père devient ce personnage persécuteur jusqu'au meurtre.
Freud, dans Totem et Tabou, étudie cette image clivée du totem sacrifié qui reviendra après sa mort sous forme d’esprit maléfique pour se venger des vivants, ne pouvant que lui obéir et apaiser sa colère en lui offrant des sacrifices. Cette image diabolique est née sans doute de la peur première des représailles d’un meurtre à venger. Image projetée des tendances meurtrières humaines sur des imagos divines à adorer. Dieu le père nous apparait clairement dans les fantasmes de Fouad comme un diable maléfique qui s’empare de ses pensées pour le condamner , le casser et le détruire : cette toute puissance de la pensée obsessionnelle qui nous renvoie à la pensée magique des primitifs et des psychotiques (ou la part psychotique dans les névroses).
V. Saraglou (Structuration psychique de l’expérience religieuse, l’Harmattan, Paris, 1997) conclut dans une étude doctorale détaillée : « Le père serait donc l’image originaire individuelle aussi bien de Dieu que du diable… et comme le serpent tentateur, maître du savoir » ; « le diable incarne cette face-là du père imaginaire, celle où le père est supposé tout savoir ». Saraglou ne nie pas par ailleurs que la mère qui est souvent associée à la vie, l’est aussi à la mort, et en référence aux « Complexes familiaux » de Lacan qui analyse comment, quand l’image maternelle n’arrive pas à être sublimée, devient facteur de mort. On pourra aussi poser une hypothèse à propos de l’image du père non sublimée, qui reste comme « objet bizarre » bêta, persécuteur. Un père- démon qui pourra dévorer oralement et/ou sadiser analement.
Ce qui nous renvoie à l’affiche de notre exposé : Moïse de Michel Ange avec des cornes amalgamées significativement à des couronnes. Car quand Moïse descend du Mont Sinaï avec la tablette des commandements divins, une grande lumière émana de son visage (on l’appelle aussi Mana ou couronne des mediums, rois, chamans, etc.) ; cette lumière qui fut transmise par la vision divine, dota Moïse de cette fonction double de dieu et de diable, semant la terreur par son pouvoir et son savoir qui pouvaient tuer juste par un simple regard.
Quant au patient enchainé par cette violence paternelle internalisée, il déclare : « Je me sens toujours écrasé, ligoté, ne pouvant braver aucun interdit… » Prenant conscience qu’il assimile l’image de son père à toute autorité existante, il continue : « J’ai l’impression qu’ils peuvent faire de moi ce que bon leur semble [les autres], sans que je ne puisse m’y opposer. Je me sens écrasé, impuissant. J’assimile toute autorité à mon père, s’emportant, et se mettant en colère tout comme lui : avec des règles strictes, sans indulgence, pouvant aller jusqu'à l’agression physique, exigeant la perfection sur terre. Dans tout cela, je n’ai aucun droit au chapitre. »
C’est toujours le péché, la faute ou l’erreur qu’il faut éviter, sinon l’autorité lui infligera les punitions les plus horribles. C’est à se demande si la faute était d’épouser la mère et de tuer le père, puisqu’effectivement son père est décédé et il n’arrive pas de son côté à avoir une relation avec une autre femme, vivant toujours avec sa mère dans une relation de dépendance infantile. Il s’exprime : « Quand je suis dans l’erreur, je sens qu’il (le père) est en colère contre moi, qu’il me maudit, veut me piétiner, incapable de dialoguer, de communiquer, de patienter. Je n’ai jamais senti qu’il veut sérieusement m’aider. Il s’insurge toujours contre moi. »
Dans son livre Les formes élémentaires de la vie religieuse (Durkeim,1979) Durkheim définit la religion sans y évoquer, ne serait-ce qu’une fois, le mot Dieu ! Il parle de sacré, d’interdit, de croyance, de communauté. Car le bouddhisme par exemple est une religion qui n’accorde aucune importance aux dieux, l’homme est le seul responsable de son salut… Durkheim décrit l’attitude religieuse salvatrice de l’angoisse humaine (bien qu’elle pourrait aussi être source d’angoisse par la peur transmise de génération à l’autre, d’un jugement final par exemple) ; il dit : « L’attitude religieuse n’est pas si différente de l’attitude sociale, mais elle se donne, avec l’expérience du sacré un puissant outil pour résister à l’angoisse et à l’absurdité du monde. » (Ibid. p. 304)
L’histoire de Fouad ressemble peut-être à tant d’autres, mais les conséquences pathologiques de sa relation avec son père ont handicapé sa vie entière.
Débutant sa thérapie en 2008, Fouad avait 35 ans. Il avait perdu son père à l’âge de 15 ans. Enfant, il avait subi des abus violents tant verbaux que corporels de la part de ce père avec une mère, faible et effacée (à qui il s’est probablement identifié) qui ne s’interposait point lors des abus. De ce fait, le fantasme « battre un enfant » n’est plus seulement imaginaire et la relation sado-masochiste réelle s’associe à une jouissance-douleur de fustigation remémorée avec une connotation presque masturbatoire ! Lacan transforme joliment la phrase « un enfant est battu » par une autre assez pertinente : « Le père bat l’enfant haï en moi » ! Marie Claude Baietto explique génialement cette pensée de Lacan, elle dit : « Ce qui fait plaisir au sujet du fantasme est que l’autre n’est pas aimé ; de la sorte il tend à l’abolir comme sujet. L’autre est visé dans son être même par une « déchéance subjective » accompagnée de haine, mais aussi d’amour » (Analyse freudienne, Erès, 2004). Fouad s’est haï toutes ces années, recevant une éducation rigide scandée d’une grande brutalité et de critiques destructrices qui l’ont conduit à mater son Moi, le mettant ainsi dans l’incapacité de poursuivre ses études ou d’avoir un travail fixe. Ce surmoi destructeur a été internalisé pour devenir son propre bourreau durant toute sa vie (un surmoi qui s’empare d’une partie de son Moi ou vice versa !). Un bourreau père et un Dieu aimé et haï en même temps.
Ses mots le disent clairement : « Cette obsession et oppression me poursuivent, m’empêchent d’entreprendre même l’acte le plus bénin, par exemple acheter un pantalon ou des chaussures ! Cette pensée me martelle : tu es incapable, ignorant, il t’est interdit, tu vas à l’échec…. Ceci m’entrave et me réduit toujours à néant dans mes initiatives et entreprises… je redoute de discuter avec cette voix écrasante qui me harcelle ! c’est la raison pour laquelle je garde le silence. Si je rétorque, il se mettrait en colère et me détruirait, m’écraserait… » il continue : « J’ai peur d’accepter ma faiblesse, mes manques. J’ai peur d’être pêcheur, imparfait. Je redoute ce qu’il (dieu-père) pourrait m’infliger. De même face à toute autorité, je me comporte ainsi avec peur et infériorité. »
Sophie de Mijolla se demande dans son livre Le besoin de croire (Dunod, Paris, 2004) si le péché ressenti par le fils envers le père-dieu est simplement un péché ou une dette. Dette d’amour, de paternité, de don de vie ? se référant à Freud dans Moïse et le monothéisme et affirmant que « … avec le péché originel, la mort était entrée dans le monde » (p.17). Ce n’est plus une transmission phylogénétique de l’acte meurtrier comme le suppose Freud dans Totem et Tabou, mais égaler dieu en mangeant du fruit du bien et du mal semble être inscrit dans la nature humaine et non transmis. Car l’être humain comme le dit De Mijolla est un être qui aspire à la connaissance, cette pulsion que Freud nomme épistémophilique et que Klein combine avec l’attaque sadique du ventre maternel et qui sera sublimée ultérieurement en quête scientifique.
Fouad pose le problème avec Dieu le père comme si c’était un problème de manque de savoir, ou comment sonder et comprendre ce père violent ; comment comprendre Dieu ? Il dit : « Le problème consiste à ce que je ne précise pas, je reste dans les généralités. Il me semble que sans éducation je ne suis pas à même de comprendre. Comme si sans éducation je n’arrive pas à saisir Dieu et réciproquement Dieu ne peut pas me comprendre. Je sens que sans éducation, je n’atteindrais pas le paradis ou la sainteté. »
Ajoutons alors au chapitre du fantasme kleinien qui consiste à sonder l’intérieur de la mère, un autre fantasme aussi tenace et inquiétant : celui de s’insurger à l’intérieur d’un père insondable, mystérieux, sans pour autant s’engloutir et périr !
Fouad se verse dans la religion chrétienne qui est selon Freud la religion du fils en comparaison avec celle du père, le judaïsme. Un fils qui est venu racheter le meurtre originel du père en se sacrifiant à son tour. Fouad se place dans la position du fils mal aimé, persécuté par un père tout puissant dont la violence n’est que meurtre et vengeance. De quelle vengeance s’agit-il ?
De ce fantasme du père qui croit que son fils désire s’arroger son pouvoir ? ou se défend-t-il de ses désirs pédophiliques ou homosexuels envers lui ?
Actuellement Fouad vit aux dépens de sa mère et de son frère aîné. A ses dires, son frère « serait un peu efféminé » (partie de lui). D’ailleurs leur relation, conflictuelle, lui rappelle par moments celle qu’il entretenait avec son père, relation très ambivalente, idéalisée et haïe en même temps. Il enchaîne : « … quand à mon frère, je me sens incapable de m’opposer à lui, je n’arrive pas à le concevoir dans sa petitesse, sa bêtise, son ignorance ;il est toujours pour moi grand et parfait, omniscient et ayant toujours raison ». Dans d’autres occasions Fouad exprime combien il hait son frère qui essaye de l’écraser comme son père ; je le cite : « De l’intérieur, je ressens un rejet envers mon père, et surtout envers mon frère. Parfois je ressens de la haine à son égard. Je n’ai jamais senti qu’ils étaient à mes côtés, qu’ils m’aimaient. Plutôt, ils se disputaient constamment avec moi ». Pourquoi ne pas se révolter contre ce frère idéalisé et redoutable ? se demande Fouad.
« Mon frère n’est jamais à mon écoute, méprise mes propos, les prend toujours en dérision. Je me demande pourquoi je suis encore sous son influence ? comment puis-je à mon tour le mépriser et le ridiculiser? comment puis-je arriver à le voir minable, limité, imparfait, commettant des erreurs, n’étant pas toujours dans ses droits ? »
Cela ouvre un autre chapitre sur les défaillances que Fouad éprouve, manques, dévalorisation et faiblesse…il crie de douleur : « Lorsque je veux discuter ou parler, je me sens comme un tout petit enfant que personne n’écoute, que tout le monde prend en dérision. Personne ne me respecte, ne m’écoute et n’a de considération pour moi…quand je veux relater un fait ou citer un exemple quelconque, j’angoisse beaucoup. Je me perds, je rentre dans les détails, et on me dit que c’est incompréhensible. Par exemple si je suis dans un trafic pour 12mnet que je veux relater cet incident, en disant que ça a pris 10 ou 15mn, je m’embrouille, car ce n’est pas correct. Mes pensées commencent à me mettre en doute, car je devrais être plus précis, plus exact… j’appréhende le repos. Je ne sais pas me reposer. Il m’est interdit de me détendre. J’ai toujours quelque chose à faire… à chaque fois que je veux entreprendre la moindre action, il s’interpose pour me dire que je suis incapable, ignorant (un âne !) ; qu’il m’est impossible de réussir quoi que ce soit, que seul l’échec est au rendez-vous avec moi. »
Cette voix persécutrice interne est projetée dans le monde extérieur qui devient à son tour redoutable, jugeant ses faiblesses et imperfections : « Le grand problème c’est la peur, affirme-t-il. Beaucoup de choses m’effrayent. Je suis hanté par la peur, et je me sens constamment insécurisé. Je suis rejeté, non accepté tel que je suis » . Paradoxalement Fouad déifie le monde qui devient à l’image divine. Il dit : « Je perçois le monde incommensurablement grand, je le redoute ;je le déifie, le magnifie, je me prosterne devant lui, je l’adore, je le considère encore en tant que mon dieu… »
Fouad s’interroge sur comment accepter ses faiblesses, sa sexualité, ses blessures. Il se demande comment s’aimer dans ses manques…bien que par ailleurs, son corps est érigé en objet narcissique, aimant l’habiller et le redoutant en même temps.
Son adolescence fut difficile, il toucha à la drogue.
A 24 ans, il commence à sortir avec ses amis et à côtoyer des jeunes filles. Ceci provoque en lui un sentiment de grande culpabilité et d’infériorité (du fait de son manque d’éducation et de ses revenus limités), se traduisant par des attaques de panique : difficulté à respirer, étouffement, surtout s’il est pris dans un embouteillage et lors de ses sorties avec ses amis. Il sombre alors dans un état dépressif et suit un traitement médicamenteux pendant deux ans. Il enchaine : « Je me sens très intimidé par mes amis et je crains toujours de les mécontenter. Je redoute de leur mettre des limites ou de les remettre à leur place s’ils dépassent ces dernières. Néanmoins, je plaisante avec eux, je prends les choses à la légère car j’ai peur de m’imposer. Je garde toujours un profil bas avec eux. Je sens que je n’ai rien à leur donner et je ne me respecte pas en leur présence, parce que n’ayant pas d’estime pour ma personne’’.
Fouad se réfugie alors et se déverse à fonds dans la religion en contractant une névrose obsessionnelle religieuse grave : Il assistait à huit messes le dimanche et à quatre messes les jours de semaine, à part la récitation répétée du rosaire et les confessions répétitives…Tout cela afin d’apaiser sa culpabilité qui ne faisait que s’accroitre en projetant l’image de son père sur Dieu. En effet, son père le culpabilisait continuellement à tout propos : sexualité, filles, masturbation, prière, études…, stipulant qu’il faut étudier et prier sans s’octroyer le moindre plaisir (jouer avec sa grand-mère faisait même partie des interdictions).
Fouad se lamente : « Je sens que mon père veut que je sois un ange dans un corps humain. Il veut que je sois parfait, à l’image d’un Saint, m’interdisant d’être faible et d’accepter ma faiblesse ; de même, il me défend formellement de commettre une erreur quelconque, de me masturber ne serait-ce qu’une fois dans la vie, au risque de provoquer sa colère… »
Ignace de Loyola expérimente aussi de son côté une torture pareille avant sa rentrée au couvent ;il se confesse inlassablement sans pouvoir expier les péchés d’un passé toujours présent .Son obsession religieuse n’a pu pourtant s’expier avec les prières, les jeûnes et les pénitences allant jusqu’à frôler un jour l’idée de suicide. La capacité de sublimation chez le jeune Ignace a pu l’aider à transcender sa névrose, tandis que notre patient a lutté sans succès ! Avoir ou non la capacité de sublimer est un chapitre épineux à ouvrir ultérieurement.
Cette aspiration religieuse acharnée puise sa source d’un désir quelconque ; mais lequel ? A. Vergote essaye de le définir : « Le désir religieux ne trouve en Dieu sa jouissance qu’en éprouvant simultanément dans ce rapport son manque le plus radicalement creusé ». Fouad trouve sa jouissance dans cette soumission à un dieu-père où la relation agressivo-libidinale répond à une souffrance et une terreur tyrannique, qui mine encore plus ce creux (celui du manque) et endigue cette relation entachée d’un manque immense d’amour, de dialogue père-fils.
« Je me dois d’être parfait de prime abord et ne commettre aucune erreur de toute mon existence… » déclare Fouad, et un peu plus loin à propos de sa sexualité : « Je ne me permets pas d’être moine tout en pratiquant la masturbation ne serait-ce qu’une seule fois, par faiblesse ! »
Étant strict envers lui-même jusqu’au despotisme, il n’admet pas l’erreur, par identification au père : « une pensée m’obsède et me domine : l’erreur m’est défendue. Il ne m’est pas autorisé le moindre écart, ni la faiblesse et l’échec les plus minimes. »
Fouad essaie à un moment donné de diminuer ses rituels religieux expiatoires suivant les conseils de son directeur spirituel. Il oscille concernant sa vocation religieuse, se voyant encore imparfait tant spirituellement que culturellement pour s’y adonner.
Mais paradoxalement, son engouement religieux ne le rend pas plus humain ; par exemple s’il va à la messe et rencontre une vieille dame de 85 ans qui est tombée dans la rue, il ne s’attardera pas à l’aider à se relever de crainte qu’il n’arrive en retard à la messe !(ce qui nous rappelle la cruauté des hystériques et des obsessionnels bien sur !) ; Le rituel l’emportant ainsi sur l’affectif en lui. Il reconnait lui-même ce manque d’empathie envers autrui, l’autre n’existe pas. Seule prédomine la voix omniprésente de son père dans sa tête, qui le fustige en lui disant : « Fais ceci, ne fais pas cela, tu dois être toujours parfait, tu dois lutter contre tes désirs… »,de sorte qu’ il est envahi par la culpabilité : chaque masturbation lui provoque des maux de tête, des pleurs et de l’insomnie. Par la suite, il essayera de se disculper en se déversant à nouveau dans le rituel religieux excessif. Ceci se reflète sur sa vie sexuelle par un problème d’impuissance et d’éjaculation précoce à chaque fois qu’il approche une fille. Il est à noter qu’il n’a jamais eu de relation sexuelle complète. La femme est réduite pour lui à une forme extérieure narcissique, à des seins et fesses. Il lutte pour ne plus être touché par la gente féminine afin de pouvoir ainsi rentrer au couvent.
Fouad aspire vigoureusement, malgré cette image relationnelle sombre, à un idéal de père-dieu qui assouvit ses attentes. La différence entre le père idéalisé et le père réel semble inexistante, il déclare: « Je n’ai pas connu le père qui est à l’écoute, qui sécurise, qui soutient et qui éduque. Je le mets toujours sur un piédestal et je n’arrive pas à le voir tel qu’il est. »Fouad passe aisément de l’amour de son père à celui de Dieu. Comment aimer et être aimé ? Il gémit de douleur : « Je n’arrive pas à aimer Dieu ni à ressentir son amour. Je sens qu’il est en colère contre moi et qu’il est très pointilleux, avec un visage fermé… Je n’arrive pas à aimer Dieu, le cajoler où l’enlacer. Je ne le sens pas sympathique, beau, calme. Je le vois laid, cynique, au visage troué, horrible ! ». Cette image tordue d’un Dieu-père au trou noir nous renvoie à un fantasme où notre patient bascule sans retenue comme dans un précipice rappelant celui d’Alice au pays des merveilles, avec la mauvaise mère sorcière, déplacée chez lui vers à une image de père sorcier qui happe ses enfants comme un ogre terrifiant.
Malgré toute cette torture, Fouad ne désespère pas. Il aspire toujours à un père et à un Dieu bienveillant, aimé et aimant et se demande ou le trouver…Il se lamente en décrivant l’image d’un père et d’un dieu idéal ;il dit : « Comment découvrir le visage d’un Dieu ou d’un Jésus qui plaisante, rit, étant jovial, patient, affectueux, sympathique, calme, ne s’emportant pas, ne se mettant pas en colère et parlant d’une voix douce ? » Cette image clivée du père nous renvoie à l’existence des mécanismes archaïques chez les névrotiques surtout quand l’obsession est grave. Fouad visualise le pont à faire pour rapprocher les deux parties parallèles et clivées du dieu-père, c’est le dialogue qu’il a en réalité entamé à travers sa thérapie, encouragé à parler à son père, à lui exprimer ce qu’il aurait voulu lui dire s’il était toujours vivant. Ces scènes étaient d’une extrême atrocité avec un flot farouche d’émotion et de cris ;il dit : « Je dois commencer à apprendre à lui ouvrir mon cœur et lui raconter mes problèmes (« ses problèmes », dit-il, dans un lapsus) et non avoir peur de lui et le fuir ! »
Cette thérapie assez éprouvante m’avait emportée à un moment donné dans un tourbillon d’impuissance que Fouad a pu déposer en moi par projection, rencontrant ses objets internes terrifiants. Ma voix aurait-elle pu s’élever au-delà de celle de son père ?Comment amadouer les cris intérieurs tyranniques qui le hantent et le persécutent ?A certains moments, je me sentais moi-même persécutée par la voix de son père que Fouad mimait parfois dans l’espace thérapeutique, une voix sourde et cassante qui me faisait revivre le petit Fouad dans son impuissance et sa terreur devant ce géant de père qui le hantait, le matait et abusait de lui.
D’autres fois, je rentrais aussi dans la peau de mon patient tremblant, bouillonnant de colère contre ce père tyrannique de sorte que j’éprouvais avec lui le désir de le tuer et d’en finir avec lui. Parfois aussi je me réduisais en petite souris terrifiée, poursuivie par un tigre féroce !Je recevais en plein les projectiles bêta de mon patient, je les vivais totalement et essayais de les lui renvoyer en apaisant la terreur des fantasmes par une alphabétisation ardue de rêverie et de représentation. Pourrait-il m’investir de cette image maternelle qui a fait défaut dans son enfance, avec sa fonction de pare-excitation, de symbolisation, comme l’affirment plusieurs auteurs ? (Winnicott, Bion, Aulagnier, Dolto, Braunschweig et Fain, Stoloff…).
Le travail de deuil fut long et tourmenté. L’assouplissement du sur-moi despotique était une bataille hebdomadaire entre l’intransigeance et la souplesse avec des moments de désespoir.
Après neuf mois de prise en charge au rythme d’une séance/semaine, ma parole arriva petit à petit à s’intérioriser dans l’espace psychique de Fouad, remplaçant pas à pas les cris réprobateurs paternels.
L’image de Dieu et du père se séparèrent doucement l’une de l’autre. Fouad écrit enfin : « La voix de mon père commence à s’éloigner. Au préalable, elle était envahissante et prédominante, comme s’il était muni d’un micro et qu’il criait dans mes oreilles,me dictant ce qu’il y a lieu de faire et me contrariant. Maintenant, sa voix me parvient de loin, à des kilomètres de distance ! »
J’ai essayé également de travailler avec lui sa vocation religieuse : les vœux de chasteté, d’obéissance et de pauvreté pouvaient véhiculer une soumission à la loi-père comme le problème d’impuissance pourrait être sous-jacent au vœu de chasteté. La pauvreté pouvait de son côté cacher un problème de masochisme pathologique et non de dévotion. Fouad était ouvert à toutes ces possibilités avec un désir ardent de se connaitre encore plus et de pouvoir aller au-delà de ses problèmes. Il écrit : « Je ne veux pas rentrer au couvent par obéissance à mon père mais plutôt à Dieu !(son père étant assez religieux)Le cas échéant, le vœu de pauvreté aurait une connotation masochiste, et la chasteté une échappatoire à une
impuissance sexuelle et non un libre choix de renonciation provenant d’une satisfaction et d’une force ! »
Fouad luttera jusqu'à la fin de sa thérapie pour apprivoiser son père, dieu, et pour devenir plus clément envers lui-même.
J’aimerais clôturer avec ses propres mots, un cri d’espoir et de désespoir , d’incertitude, et de doutes de lui-même et du travail entrepris : « Comment puis-je savoir et accepter que je ne pourrai pas me libérer définitivement, il persistera toujours un lien qui me serre, m’asservit et que je ne pourrais jamais délier » Un petit souhait finalement ; il dit : « Si vous pouviez me restaurer l’image de mon père après vous avoir énuméré ses défauts… Votre voix commence à prédominer sur la sienne. Votre voix est calme, ne fait pas pleurer, ne critique pas, m’acceptant tel que je suis… »